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Madwain, la Musique de Piltover

Chapitre 9 - Ancien champion

le 27 avril 2016

Quelques arbres arrachés et injures proférées à l'encontre du volume incroyable de l'animal plus tard, Madwain atteignit enfin la cabane. Il donna un ultime coup d'épaule dans le sanglier pour l'approcher de la cabane et entra :
-C'est bon. J'ai chopé d'la viande.
-Très bien, je vais m'occuper de dépecer tout ça.
Le vieux sortit enfin de l'ombre de sa cabane et il devint enfin discernable. Il ne semblait pas très grand, enveloppé dans une grande cape, avec capuche, qui devait sans doute lui servir de couverture la nuit. Elle était grise sale et très abîmée. Le vieillard s'approcha de la carcasse. Il la regarda quelques instant de haut en bas puis de droite a gauche et tourna son regard vers Madwain. Il le regarda lui aussi, de haut en bas. Le vieil homme se retourna ensuite vers le sanglier et soupira comme si il était seul :
-Les jeunes... Ça se contente d'un rien c'est fou... C'est plus ce que c'était...
-Hé ho, Papi, si t'es pas content, tu pouvais aller te le chercher tout seul, hein.
Le vieux se tourna vers Madwain et sourit.
-Ne te vexe pas... Je ne pensais pas que tu me ramènerais une bête aussi grosse en fait...
Il sortit un couteau et commença à découper la peau de la bête
-Mais dit moi jeunot, comment as-tu convaincu ce sanglier que sa dernière heure était venue ?
-J'ai des arguments assez percutants, expliqua-t-il adossé à un arbre et levant son poing droit devant lui.
Le vieux regarda rapidement les gants et continua de découper sa viande tranquillement.
-Et que viens-tu faire dans un tel endroit ? Je n'ai pas des visiteurs tous les jours...
-Et bien... Je... Comment dire...
-Qu'y a-t'il ? Tu ne sais même pas ce que tu fais ici ? Ces jeunes alors... soupira-t-il en rigolant doucement.
Madwain ne pouvait, comme auparavant, pas tout déballer. C'était contre les instructions que lui avait donné Caitlyn. Sa discussion avec le barde lui revint en mémoire.
-Heu... Je m'entraîne pour la League...
-Oh. Un bien bel objectif. Mais tu t'entraînes tout seul ? Tu as une équipe, non ?
-Heu... non.
Le vieillard s'interrompit.
-Tu ferais mieux de te trouver des coéquipiers. Ou alors n'essaye même pas de participer.
-Je ne m'étais pas vraiment posé la question, répondit-il honnêtement.
-A voir tes gants et le sang qu'il y a dessus, je parie que tu te bats au corps-à-corps et que tu es plutôt du genre à faire très mal.
-On ne peut rien vous cacher... remarqua-t-il d'un air cynique.
-Mais il est important que tu ne te laisse pas avoir par cela. Si tu comptes trop sur tes poings tu te feras annihiler dès qu'ils te verront.
Le vieillard ponctua sa phrase en plantant son couteau dans la chair sans peau du sanglier.
-Mmmmh... Mais vous parlez comme si vous l'avez déjà expérimenté. Je me trompe ?
-Non...
Silence.
-Vous étiez champion de la League ? insista Madwain.
-...
-Hé... Répondez...
-Ça remonte à très loin si tu veux savoir. J'étais plutôt doué à l'époque. J'étais même plutôt célèbre. Mais la célébrité n'est pas éternelle et il faut faire place aux jeunes...
-Il s'est passé quelque chose, n'est-ce pas ?
-Pas grand-chose, tu sais... Les temps changent, et il faut du sang neuf sur les Champs de Justice.
-Les Champs de Justice ?
-C'est comme cela qu'on appelle les terres réservées aux champions. La Faille de l'Invocateur, et la Forêt Torturée.
-Il y a aussi la Brèche de Cristal et l'Abîme Hurlant il me semble.
-Je ne connais pas ces lieux... Cela a dû bien changer depuis ma dernière venue. Mais je suis trop vieux pour me battre. Et de plus, je doute que tout le monde soit heureux de me revoir...
-Pourquoi ça ?
-Hé bien vois-tu... Lorsque j'ai quitté la compétition, il n'y a pas vraiment eu d'adieux chaleureux. Mon ancienne équipe n'appréciait pas trop ma franchise quant à ce que je pensais, notamment une ancienne collègue et sa soeur jumelle...
-Vous étiez si célèbre ?
Le vieux rigola doucement et s'étouffa dans son rire. Il toussait si fort que s'en c'était inquiétant.
-Hé papi, ça va ?
Le vieillard finit par calmer sa toux et respirait très fort. Il semblait essoufflé. Il prit un bon morceau de viande et retourna dans sa cabane. Madwain pris un autre morceau découpé et le suivit. Il était vraiment intéressé par ce qu'il racontait. Le vieil homme s'était rassis dans l'ombre et alluma une bougie qu'il posa sur un meuble.
-Aller, on va se faire ce repas, la nuit va tomber dans quelques heures. Mais il va falloir que tu m'aides, je ne suis plus sûr de pouvoir faire quoi que ce soit seul désormais.
-Vous pouvez m'apprendre ? Je ne sais pas vraiment faire la cuisine...
-Moi non plus... Mais j'ai quelques recettes qui sont plutôt nourrissantes.
Les heures passèrent, la nuit tomba. Madwain et le vieil homme passèrent la soirée a discuter du passé.
-Et bien... C'était délicieux, merci beaucoup de m'avoir appris tout ça. Je suis pas prêt de mourir de faim maintenant, s'exclama Madwain en affichant un large sourire.
-Ce n'est rien. Merci a toi d'avoir ramené toute cette viande. J'allais justement tomber à court. Si tu le désire tu peux dormir ici cette nuit. Je suppose que tu n'as rien prévu pour t'abriter, souffla-t-il en souriant également. Mais avant cela... Je voudrais savoir... Comment as-tu réellement tué ce sanglier ? Le tuer à mains nues est impossible... Je connaissais ce sanglier... Enfin je sais qu'il était ce qu'on pourrait appeler un chef de meute et ils ne sont pas tuables facilement, même lorsque l'on est armés. Donc, à mains nues ? Je ne te crois pas. »
Le sourire de Madwain resta figé sur son visage. Le vieillard se doutait de quelque chose et Madwain n'arriverait pas à mentir à quelqu'un de si expérimenté en matière de combat. Son sourire s'effaça et il soupira.
-Bon, je vais vous le dire...
-Comment va ce cher Heimerdinger ? »
Le vieillard venait de le couper avant même qu'il put s'expliquer et cela le déstabilisa énormément.
-Vous le connaissez ?
-Bien sûr, jeunot ! C'est le champion le plus intelligent qu'il m'ait été donné de voir. Et sans doute l'être vivant le plus intelligent que ce monde ait porté.
Il fit une pause.
-Figure toi que je le connaissais très bien, il me parlait souvent de ses inventions. Cela me passionnait, figure-toi. Penser qu'une créature d'allure si pittoresque puisse penser et créer de telles choses. C'est fascinant, tu ne trouves pas ?
-Vous l'avez déjà affronté ?
-Oh non. J'ai été suffisamment chanceux. Il était encore jeune à cette époque. Il n'avait pas beaucoup d'amis parce qu'il passait tout son temps à créer des inventions loufoques.
-Loufoques mais efficaces... chuchota Madwain en regardant les gants sur ses mains.
-C'est donc une de ses inventions...
-Ah... Heu... Oui.
-Cela m'étonne moins, que tu ais pu terrasser ce mastodonte... Cela me rappelle quelque chose d'ailleurs.
-Quoi donc ?
-Il y a très longtemps, quand j'étais encore à la League, je passais le voir de temps en temps. Il arriva qu'une fois, après qu'il ait entendu des gens faire la fête avec de la musique, il eut une idée. A cette époque, il avait envie de se faire des amis et il a donc pensé, je suppose à ce moment-là, à créer une invention permettant de faire de la musique. C'est bien à cela que sers ton casque n'est-ce pas ?
-Oui mais pas seulement, les gants émettent également du son.
-Alors je dois te prévenir, c'est à ce moment de la vie d'Heimerdinguer qu'il s'intéressait à l'intelligence artificielle. Je ne me souviens plus très bien de ce qu'il m'avait dit... C'est que ça remonte à très loin, tenta-t-il de se rappeler en se grattant le haut du crâne. Je crois qu'il parlait de quelque chose qui adapterait l'ambiance aux personnes présentes. Mais je me fais vieux et je ne suis plus vraiment sûr de moi. En tout cas, fait très attention avec cette arme. Le son peut aussi avoir une incidence sur notre manière de penser et sur nos actes. Ne te laisse surtout pas manipuler, tentes plutôt de manipuler cette arme avant qu'elle ne le fasse.
-Oui mais je ne...
Il ne put finir sa phrase. Inconsciemment, Madwain avait remis son casque sur ses oreilles et il se resserra soudain, comme la première fois. Reconnaissant cette sensation et se rappelant de dégâts causés par un tel incident, Madwain, encore conscient de ses actes, sortit en trombe de la cabane et courut droit devant lui. Il voulait éviter à tout prix de blesser quiconque et encore moins ce vieil homme si chaleureux. Il ne put faire qu'une cinquantaine de mètres avant de s'écrouler à quatre pattes, immobilisé par le bruit blanc de son casque. Madwain serrait les dents, supportant tant bien que mal la douleur crânienne que lui infligeait son casque. Le bruit blanc diminua lentement pour finalement disparaître quelques secondes plus tard. Une voix se fit entendre.
Bien, nous sommes assez loin. J'ai à te parler Madwain.
-Hein, qui me parle ?
La voix qui venait de surgir ne ressemblait à aucune voix que Madwain avait pu entendre dans sa vie. Elle était composée de tous les sons les plus mélodieux de ce monde pour ressembler à une voix féminine. Elle résonnait dans la tête de Madwain qui ne pouvait que l'écouter tant elle était belle.
Écoute, je suis l'arme, comme vous appelez ça. Il est temps que nous parlions.
-Que nous parlions hein... De quoi ? Des maux de têtes que tu me fais avoir ?
Le bruit blanc se fit sentir comme un coup de poing sur le haut du crâne.
-Silence !
-Aaaaaïeuuuuuh ! C'était vraiment nécessaire ?
-Cesse tes idioties. Immonde créature.
-Hein ?
-Je sais ce que tu vas faire de moi ! Une arme de mort ! Vous les êtres vivants vous ne pensez qu'au pouvoir. J'ai accepté de t'aider jusque-là mais après ce que cet homme t'a révélé sur moi... Je dois agir au plus vite.
-Keuwa ? Tu penses vraiment ça ?
Madwain leva un sourcil et s'assit plus confortablement.
-Évidemment, mon créateur m'a prévenu ! C'est gravé au plus profond de moi... Je suis une potentielle arme de destruction massive.
-Pour moi t'es un gros juke-box...
-Quoi ?! Comment peux-tu penser de la sorte ? Je suis...
La voix fut plus hésitante.
-Tu... Je... Comment m'as-tu eu ?
-Juste une livraison qui a dérapé... grimaça Madwain en s'allongeant sur le dos, les mains derrière la tête.
-Comment ça ? Monsieur Heimerdinguer m'avait pourtant dit que ce serait lui qui me réveillerait a nouveau... Je ne détecte pourtant as la moindre trace de mensonge dans tes dires...
-Tu fais détecteur de mensonge ? Waow... Je savais pas. Mais pourquoi je t'aurais menti ?
-Pour me duper !
-Pour ?
-M'amadouer !
-Afin de ?
-Me contrôler !
-Avec pour objectif de ?
-De... de faire du mal aux gens avec mes capacités !
Un silence passa, Madwain réfléchit quelques secondes et se gratta l'avant du front. Finalement il grimaça à nouveau :
-Désolé j'suis pas intéressé.
-Et tu ne mens pas... dit doucement la voix. Mais tu l'as bien vu, non ?
-De quoi ?
-Je suis une arme très puissante ! Tu as bien constaté la facilité avec laquelle tu t'es sorti victorieux de la créature qui attaquait ce barde ?
-Ouais...
-Et de l'aisance avec laquelle tu a immobilisé le sanglier géant pour le vieil homme ?
-Ouais...
-Et cette puissance ne te donne pas envie de... je ne sais pas moi, conquérir des pays terrasser des armées, renverser des dirigeants ? Tu le pourrais...
-Bon écoute moi maintenant. Ça suffit tous ces «à priori» là... Des guerres et des batailles ? Pfff je mets au défi quiconque de faire la tournée des bars de Piltover avec moi et d'en sortir sans un oeil au beurre noir. Ça vaut toutes les batailles et les guerres, et en plus à la fin, on rigole bien même si on s'est foutu sur la gueule avant. Et en plus la politique, moi, j'men fiche complètement alors renverser des royaumes ! Ha ha...
La voix resta silencieuse alors que Madwain riait seul de son raisonnement.
-Mais surtout, tu parlais du barde et du vieux... Est-ce que tu m'as vu les menacer avec toi ? Non ! Tous ce que je veux c'est vivre peinard et aussi... pouvoir continuer de t'écouter. »
Il fit une pause.
-Nan, sérieusement ! Tu fais la plus belle musique que j'ai jamais entendue et tu me remonte le moral. Je m'y connais pas en technologie mais je me doutais bien qu'il y avait quelqu'un qui me soutenait. Je t'ai même répondu l'autre fois.
-...
-Hé y'a quelqu'un ? M'dame ?
-Ok... et je m'appelle ML0-D, pas «m'dame».
-Hein ?
-Ça se prononce mé-lo-die. Et je te crois.
-Pour ?
-Tu ne... m'utiliseras pas à de mauvaises fins.
-Et il t'a fallu tant de temps pour comprendre ça ? Et ça se dit être une « intelligence » artificielle...
Le bruit blanc revint comme pour donner un petit coup derrière la tête de Madwain.
-Hé soit poli quand tu parles de moi !
-Ah bah voilà t'est décrispée c'est cool
-Humpf.
-Bon... Faut qu'on retourne voir le vieux. Je suppose qu'il doit s'inquiéter un peu et puis... (Madwain bailla) faut vraiment que j'aille me pieuter.
-Ok. Allons-y alors.
Sur le chemin du retour, Madwain marcha au rythme d'une musique très douce et apaisante. Il se sentait étrangement bien. Il rentra dans la cabane. Le vieux l'attendait, emmitouflé dans une couverture, enfoncé dans un fauteuil.
-Ça va comme tu veux jeunot ?
-Tranquille, Papy, j'devais juste m'entretenir avec quelqu'un, dit-il en souriant.
Le vieil homme sourit à son tour.
-Ton lit est là-bas. D'après ce que j'ai appris de toi, tu as encore beaucoup de chemin à parcourir... Alors va te coucher.
-En effet, répondit Madwain en soupirant.
Quelques minutes plus tard, ML0-D murmura dans son esprit :
Merci.
La nuit passa.

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